ÉLUCUBRATIONS // Voyageuse solo et introvertie : c’est possible !

Quand j’annonce que je vais voyager en solo, la même réaction revient dans environ 99,99 % des cas.

Mais tu vas rencontrer des gens en chemin, non ?

Tu vas aller dans des auberges de jeunesse, pour rencontrer des gens ?

Oh c’est super, c’est comme ça qu’on rencontre le plus de gens.

Rencontrer des gens. Les autres n’ont souvent que ça à la bouche (c’est soit ça soit Ha ben on a la belle vie hein – ça fera une autre chronique !). Les portraits de nomades solo en ligne exultent souvent qu’ils n’ont « jamais été seuls un instant en voyage ! ». Comme si voyager seul.e était une source d’angoisse généralisée, et que le monde allait courir au chaos si jamais un voyageur reste seul en voyage.

Mais cette angoisse, c’est la leur. J’ai d’autres angoisses quand je voyage : est-ce que mon avion va arriver à bon port ? Est-ce que je vais réussir à me faire comprendre ? Est-ce que je vais être arnaquée, pickpocketée ?

Mais par contre, je ne me demande jamais si je vais supporter d’être seule.

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Je sais que c’est inconcevable, mais j’aime être seule. Ici, rando en solo au Mont Carleton.

Si je suis une voyageuse solo, je suis aussi, et avant tout, une voyageuse introvertie. L’introversion, à la différence de la timidité qui désigne la peur du regard des autres (les deux n’étant pas incompatibles), renvoie au fait d’avoir besoin de moments pour soi, et d’être littéralement fatigué par le contact avec ces fameuses gens.

Ce point étant clarifié, vous comprendrez mieux que quand je voyage seule, ce que je recherche, ce sont les moments en tête-à-tête avec moi-même. Les moments où je m’entends penser. Ceux où je savoure chaque instant parce que je suis pleinement là, et pas dans une conversation avec des gens. Introversion rime aussi avec introspection.

On peut avoir différentes raisons de voyager en solo : on vit seul, les amis n’étaient pas dispos, on n’aime pas le côté troupeau des voyages organisés.  Je ne crains pas le fait d’être seule en voyage : je le recherche. Quand je pars seule, je VEUX être seule (ce qui n’empêche pas d’aimer aussi les voyages en couple et entre amis, évidemment). Jusqu’à la lie.

Toi qui me lis et qui est extraverti.e (c’est-à-dire qui te ressources au contact d’autrui), j’aimerais te faire comprendre la plénitude que je ressens à être seule dans un endroit inconnu, avec pour seule responsabilité mon emploi du temps, mon plaisir, mes expériences. Je comprends aussi que la solitude puisse être difficile à supporter quand on n’a pas mon caractère, mais je vous assure : en voyage, je suis bien toute seule.

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Regarde comme j’ai l’air heureuse à prendre mon petit-déj dans la brume du petit matin à Tallinn, en février 2014 !

Je ne fuis évidemment pas tout contact avec les gens, qui restent bien agréables. Je vais dans des auberges de jeunesse comme toute personne normale de 32 ans toute voyageuse à petit budget. Il m’arrive de couchsurfer. Mince, je vais même faire des free tours avec plein d’autres gens. Et même que des fois, on continue l’après-midi ensemble. Ou on fait d’autres visites ensemble le lendemain. Au Mexique, j’ai même passé une grande partie de ma seule et unique semaine là-bas avec des gens ma foi bien sympathiques, c’est dire.

Mais rencontrer des gens n’est pas la raison d’être des mes voyages, ni même une condition essentielle. C’est un à-côté appréciable, mais facultatif. Et certainement pas une obligation.

À mes yeux, l’avantage absolu du voyage est qu’il s’agit d’une solitude choisie. Je me délecte du fait de n’avoir de compte à rendre à personne, pas même aux voyageurs qui partagent mon auberge de jeunesse : hormis les politesses d’usage, je ne leur dois rien, aucune conversation, aucune visite ensemble. Eux non plus ne me doivent rien.

Si on a des atomes crochus lors des quelques banalités échangées autour d’une casserole à la propreté douteuse dans la cuisine d’une auberge de jeunesse, c’est parfait. Si non, alors chacun continue son chemin. Je ne ferme pas la porte aux rencontres, mais je ne les provoque pas systématiquement non plus.

Quand je couchsurfe, c’est que j’ai l’espace cerveau disponible pour cette expérience. Rencontrer des gens qui vivent dans les endroits que je traverse est fascinant, mais malheureusement épuisant, physiquement, pour une voyageuse introvertie. Lors de mon tour d’Europe, j’avais alterné auberges et couchsurfing car il me fallait littéralement trois jours de solitude après chaque séjour chez un hôte.

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Et là, ravie d’avoir gravi la pyramide de Coba, dans le Yucatan, en mars 2015 !

Pourquoi je vous raconte tout ça ? Pour vous dire à quel point j’apprécie immensément mes trois semaines en solo à Antigua. J’ai choisi une pension avec une chambre individuelle, où je peux me retirer en toute solitude si je ne suis pas d’humeur à parler, et une cuisine commune, où je peux traîner si j’ai envie de sociabiliser.

Pour autant, je passe une grande partie de mes journées seule en ville, et mes seules interactions sont dans un espagnol maladroit, pour commander un savoureux pellenito de platano (beignet de banane) ou una limonada con agua, por favor.

Seule avec mon livre ou mes pensées, généralement dans un lieu où le spectacle est assuré soit par la rue, soit par le volcan, je peux me ressourcer. C’est ça aussi, voyager seule. Se retrouver, (re)trouver ce qui a du sens pour moi, ce qui me fait plaisir à moi. Dîner à 17 h 30 si j’en ai envie, aller me coucher avec un livre à 20 h pour lire deux heures de suite un bon livre. Marcher sans fin en admirant le volcan. Méditer sur ce qui me plaît dans la vie, dans ma vie, essayer de remettre les pendules à l’heure avec moi-même. Prendre soin de moi.

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Lors de mon road-trip solo en van vers le parc national de Gros-Morne, Terre-Neuve.

Et dans le cas précis de ce voyage à Antigua, travailler, me concentrer sur mes traductions, carburer pour renouer un peu avec le plaisir de bien traduire. Mon année 2016 a été un tourbillon exaltant au niveau professionnel, mais je me suis laissée un peu aspirer dans la production à la chaîne, peut-être au détriment de la qualité de mes prestations. Ici, seule, je peux retrouver un rythme, qui passe par la fréquentation d’un espace de travail partagé, des horaires précis.

Voyager en solo est pour moi comme une retraite spirituelle, énergétique. Mes voyages me donnent tout l’énergie du monde et m’apaisent l’esprit car je suis, momentanément, concentrée sur mes petits besoins.

Voyager seule en étant introvertie est une belle expérience d’introspection aussi égoïste qu’hédoniste, dont je ressors généralement enrichie. Côtoyer les gens aussi est enrichissant, mais en aucun cas une obligation pour faire un beau voyage.

Et toi, tu es introverti.e et tu voyages en solo ? Comment tu le vis ? Tu te forces à rencontrer des gens ? Raconte-moi tout ça en commentaire !

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16 thoughts on “ÉLUCUBRATIONS // Voyageuse solo et introvertie : c’est possible !”

  1. Cet article me rappelle beaucoup mes séjours au pair. Alors que c’est censé être le must pour la socialisation, je n’ai jamais voyagé à plusieurs ou sympathisé pendant mes escapades. Je pense que je suis encore pire que toi (sympathiser avec un groupe de touristes ou à l’auberge de jeunesse, inenvisageable) 😉 Ça ne m’a pas empêchée de profiter (au contraire, je faisais exactement ce que je voulais faire, et c’était super) !

    Aujourd’hui, je ne voyage plus tellement, et je pense que si l’occasion se représente un jour, ce sera en compagnie de mon mari (on a encore un voyage de noces à faire… oui ça fait trois ans qu’on est mariés, et alors ? :p). Ce qui est pas mal non plus, parce que même si la solitude ne me dérangeait pas en tant que telle, il m’est tout de même souvent arrivé de voir quelque chose de beau et de regretter de ne pas pouvoir le partager avec quelqu’un d’autre !

    1. Audrey

      Tu mets le point sur le seul inconvénient : autant j’apprécie royalement de faire ce que je veux, autant j’adore aussi partager un beau moment avec quelqu’un. Et raconter un beau moment après, avec des mots imparfaits, ça n’a plus la même saveur… C’est ma seule réserve sur le fait de voyager en solo. Parce que les beaux moments créent aussi des souvenirs partagés et tissent un lien. Mais je préfère toujours vivre quelque chose seule que ne rien vivre du tout, donc j’ai fait la paix avec ça, je crois.

  2. J’allais dire la même chose que Chat-mille. Partager des super moments c’est quand même chouette. Il y a 5 ans nous étions en Inde et nous avons passé toutes nos vacances avec un voyageur solo qu’on avait adopté parce qu’on s’était fait arnaquer ensemble. C’était sympa et ça a complètement changer la dynamique de nos vacances en couple.
    Je n’ai pas encore voyager en solo hors boulot et me connaissant je serais de ceux qui cherchent le contact.

    1. Audrey

      Ma chronique n’est pas un plaidoyer pour les voyages solo, juste un plaidoyer pour les voyageurs introvertis qui n’ont pas *forcément* besoin de compagnie. Un point que je ne répéterai jamais assez : j’adore voyager, sous toutes ses formes. En couple, entre amis, seule. Mais quand je prends la décision de partir seule, j’aime autant être la plupart du temps seule, ça m’est indispensable 😉

  3. sarah

    J’aime beaucoup ta chronique car c’est vrai que c’est quelque chose dont on parle peu, le fait d’aimer être seul(e). Je n’ai jamais eu l’occasion de voyager seule car j’ai toujours mon mari avec moi (damned! ) mais je te rejoins car on ne recherche pas forcément le contact avec les gens lors de nos voyages. Ou plutôt, on recherche le contact mais avec les locaux, pas avec les touristes! ou alors juste dans des petits groupes comme lors de trek ou on sait d’avance qu’on aura au moins un point commun. En tout cas je t’admire car je ne sais pas si j’aurais le courage de partir seule comme ça.. un peu trop pétocharde 😉

    1. Audrey

      Toi pétocharde, Sarah ? Je ne peux pas le croire ! À vrai dire, je suis toujours morte de trouille avant chaque voyage :p Mais comme ça fait un moment que je voyage seule, je sais que ce n’est que temporaire. Si tu as envie de voyager seule, tu peux commencer par des week-ends en Europe, c’est un environnement rassurant et pas trop dur à apprivoiser. Après, si voyager uniquement avec ton mari te va, il n’y a pas de raison de se forcer non plus. Perso j’ai besoin des deux, des voyages en bonne compagnie et des voyages seule pour me retrouver.
      J’ai fait deux treks en famille quand j’étais ado, et je ne garde justement pas un bon souvenir de ces petits groupes où si on a besoin d’un peu d’espace, ça critique vite par derrière. Mais peut-être justement parce que j’étais trop jeune ? Tu es partie souvent comme ça ?

      1. Sarah

        et oui! Bouger d’un point A a un point B ça ne me pose pas de soucis, je le fait de temps en temps avec mon travail, mais sur place je serai tellement stressée que je n’oserais pas sortir de ma chambre 🙂 enfin si je n’avais pas le choix je le ferai peut être, qui sait? Sinon on a fait 8 jour en Finland dans un group de 8 et 15j en islande en trek et c’était très bien car au final la journée on est ensemble mais quand on marche on ne parle pas forcément, on admire le paysage, on réfléchit … et le soir on mange ensemble mais ceux qui veulent veiller restent et ceux qui préfèrent se coucher font ce qu’ils veulent. Et ces 2 fois on s’est retrouvé avec des gens super sympa dans nos âges. Mais c’est peut être juste de la chance… et lié au type de voyage aussi. par contre les cars a touristes j’ai donné une fois et non plus jamais!!!!

  4. Quand on est l’un, on a du mal à comprendre l’autre ! Je crois que je suis moitié-moitié, je n’ai pas peur d’être seule mais j’aime bien la compagnie aussi. Et en effet, en voyageant seule, c’est là que j’ai fait le plus de rencontre : j’ai trouvé ça génial, mais ça ne m’a pas empêchée d’être seule quand je le choisissais !

    Par contre les voyages organisés en troupeau NAAAAANNNNNN ! 😀

    1. Audrey

      Oui les voyages en troupeau j’ai donné quand j’étais ado, et non merci ! Parce contre, les courtes visites guidées en groupe, ça ne me dérange pas, surtout les free tours que j’adore !
      Je réfléchissais à mes précédents voyages solo et à ce que j’en retiens. Ce qui vient, ce sont des grands moments d’ébahissement total en étant seule, et des moments plus chaleureux au détour de brèves rencontres. Il faut croire que finalement, les deux sont complémentaires !

  5. Coucou !

    Je trouve que ça a un côté très relaxant, apaisant de voyager seule.
    Cela permet de ce recentrer, de ce concentrer sur l’essentiel et de faire ce que l’on veut sans contrainte.

    Par contre, en solo et qui plus est, en tant que femme, j’aurai tout de même certaines craintes.

    Belle journée,

    1. Audrey

      Coucou Laura ! Il est certain que voyager en solo au féminin donne lieu à des questionnements que ces messieurs n’ont pas… J’essaie néanmoins de rester le plus libre possible et de ne pas laisser mon genre me limiter. Pas toujours facile !

  6. J’adore ton article, j’ai littéralement bu tes paroles. C’est fou ce que l’avis des gens peut être pesant parfois, mais dans ce cas ça amène à écrire un bel article qui a du sens et qui, dans mon cas, résonne en moi. Je ne suis pas spécialement introvertie, mais j’ai des phases où je suis un peu comme ça. Et j’hésite depuis trop longtemps à partir seule de temps en temps. Il faut que je me donne le courage de sauter le pas.
    Bon séjour à Antigua !! 🙂

    1. Audrey

      Merci Cindy ! J’espère que tu arriveras à partir seule ! C’est une belle expérience qui permet aussi de mieux connaître ses propres limites 🙂

  7. Ah c’est marrant, parce que moi aussi j’ai un très fort besoin de solitude mais je le vis assez différemment ! Je fais en sorte d’avoir des moments seule (pleins, en fait) dans mon quotidien. Je ne pourrai jamais bosser dans un bureau à cause de ça, par exemple. Je sais que j’ai besoin d’espace et de temps pour moi. Par contre pour moi les voyages sont vraiment un temps de partage. J’ai voyagé seule autrefois (dans une autre galaxie), mais maintenant je n’en ai plus jamais envie. J’adore voyager en couple ou en famille ou avec des amis. Et surtout je trouve que le voyage passe tellement par les rencontres qu’on fait sur place, et c’est même quelque chose que j’aime de plus en plus, d’autant que le blog nous amène à rencontrer des tas de gens super !

    1. Audrey

      C’est sûr que le caractère évolue et que là où il y a encore 5 ans, tu ne m’aurais pas prise à discuter avec un.e inconnu.e, je m’y ouvre peu à peu… Peut-être que le voyage deviendra un moment de partage pour moi aussi, quand j’aurai fait ce cheminement-là dans ma tête. J’envie sincèrement ceux qui comme toi, envisage le voyage comme un partage. Je le vis toujours comme un moment de découverte de moi-même. Peut-être pourrais-je m’ouvrir sur les autres quand je me connaîtrai mieux…

  8. […] racisés sont rares et tous les pays ne les accueillent pas à bras ouverts. Voyager au féminin semble une évidence pour certaines, et une aberration pour d’autres. Quand j’ai fait […]

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