NOUVEAU-BRUNSWICK // Le sentier Meruimticook

Cheminer au pas d’une tortue, avec son sac sur le dos… Traverser des forêts infinies striées de vallons, se reposer dans un refuge garni d’un poêle à bois, et ne croiser personne… Ces doux rêves, ils peuvent devenir réalité sur le sentier Meruimticook, le dernier-né des sentiers de longue randonnée du Nouveau-Brunswick. Long de 52 km à l’heure actuelle, il relie le centre-ville d’Edmundston aux rives du lac Baker via un itinéraire qui suit certaines des routes forestières qui quadrillent les collines des Appalaches. Cet été, on s’est lancés pour pari de faire plusieurs longues randonnées. Pour notre premier défi, nous avons eu la chance de parcourir le sentier Meruimticook de bout en bout. Je vous emmène avec moi (mais pas dans mon sac, il est déjà bien trop lourd !) pour vous raconter notre préparation, notre expérience sur le sentier et le bilan que nous tirons.

Ce billet fait suite à un partenariat rémunéré avec Tourisme Edmundston & Région

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Le sentier Meruimticook

Né en 2019, le sentier Meruimticook est le fruit d’efforts pour donner aux amateurs de plein air locaux un nouveau terrain de jeu et faire connaître la région d’Edmundston aux randonneurs. De la première nation Malécite du Madawaska au lac Baker, ce sont 50 kilomètres qui attendent les randonneurs, tout d’abord le long de la piste cyclable du Petit-Témis à Edmundston, puis dans les forêts vallonées plus à l’ouest. À son initiative, Charles Collin et des bénévoles dévoués.

Le nom du sentier, Meruimticook (« mé-ryum-ti-kouk »), n’a pas été choisi par hasard. Son origine et sa signification wolastoquey se sont perdues dans les méandres de l’Histoire. Choisir un nom dont on ignore le sens est une mise en garde, un rappel d’honorer ce que l’on a perdu et de chérir ce que l’on a. Le sentier s’inscrit dans les initiatives qui visent à mettre en valeur le patrimoine écologique de la région afin d’en profiter de façon respectueuse. Je ne peux que souhaiter une longue vie au projet ! L’emblème du sentier est la tortue, un symbole autochtone fort puisque c’est le nom que donne la cosmogonie autochtone au continent, voire aux terres émergées. C’est aussi un symbole dans lequel les randonneurs se retrouveront, eux qui cheminent lentement au fil des jours.

À l’heure actuelle, le sentier fait environ 50 kilomètres. À terme, il devrait compter plus de 150 kilomètres entre Edmundston et le lac Glazier, à la frontière avec les États-Unis. Le camp Sisson, petit refuge doublé de plateformes pour les tentes et situé à mi-parcours, laisse entrevoir le potentiel de ce sentier prometteur qui deviendra alors l’un des plus longs de la province, aux cotés du sentier Nepisiguit Mi’gmaq. Je me prends à rêver à un sentier de type européen, où on pourrait aller de refuge en refuge en alternant nuits en tente et nuits au sec… Le rêve !

Se préparer au sentier Meruimticook

Ce sentier a beau être de difficulté modérée, un peu de préparation physique et logistique s’impose. Où dormir ? Quelles étapes prévoir ? Pour me préparer, je me suis souvent appuyée sur le groupe Facebook Le Sentier Meruimticook Group, où j’ai pu obtenir des réponses à mes nombreuses questions :

  • où trouver une carte du sentier : sur l’application Ondago. Cette application de cartes hors ligne nous a été très pratique. Même si le sentier est très bien balisé et que nous ne nous sommes pas perdus une seule fois, l’appli permet de se situer grâce au GPS et de savoir si on est à 5 km ou 500 mètres d’un point d’eau, par exemple. L’office du tourisme propose aussi une carte papier assez sommaire mais qui fait très bien l’affaire quand on a la flemme de sortir son téléphone.
  • où commencer : on nous a souvent conseillé de partir du « tunnel », au km 18. Nombreux sont les randonneurs à faire le sentier l’espace d’un week-end, et donc à privilégier cet itinéraire abrégé. Cet itinéraire permet de dormir au refuge du camp Sisson.
  • où dormir : nous qui voulions faire le sentier en trois jours, pas possible de compter sur le refuge : impossible de marcher 33 km en un jour, pas vrai ? (PAS VRAI) Il fallait trouver des bivouacs. L’aide du groupe Facebook m’a été précieuse pour savoir que nous pouvions effectivement camper le long du chemin.
  • comment se faire à manger : possible ou pas possible de faire du feu ? Hormis au camp Sisson doté d’un poêle, c’est interdit. En revanche, les réchauds sont autorisés.
  • comment rentrer une fois au lac Baker : il n’y a malheureusement pas de service de navette à l’heure actuelle. Il vous faudra deux autos, trouver un bon samaritain au préalable sur le groupe Facebook ou lever le pouce pour rentrer.

Une fois ces questions réglées, c’est l’heure de la préparation physique, mentale et logistique : se mettre en forme, se savoir capable de faire le sentier, et le plus important : prévoir à manger.

Fiche technique du sentier Meruimticook

  • Durée : de deux à quatre jours
  • Difficulté : modéré
  • Distance : 50 kilomètres
  • Dénivelé positif/négatif : 1230
  • Environnement : piste cyclable les 18 premiers kilomètres, puis routes forestières avec un peu de sentiers
  • Faune sauvage : le sentier est en territoire des ours
  • Bonne période pour randonner : de juillet à octobre
  • Accès : gratuit

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Notre randonnée sur le sentier Meruimticook

Premier jour, de l’office du tourisme d’Edmundston au rang 2

Aujourd’hui, une vingtaine de kilomètres nous attendent. Le bivouac n’est pas fixé, nous improviserons. Nous pourrions dormir au parc provincial de la république, sur une pelouse moelleuse, mais le parc n’est qu’à deux heures de marche du centre-ville. Nous préférons marcher autant que possible tant qu’on est encore frais ! On sait que demain, après la nuit sous la tente et la fatigue accumulée, on sera moins vaillants.

Nous partons de l’office du tourisme d’Edmundston, où nous avons laissé notre auto le temps de la randonnée. Il fait beau, nous sommes en forme, prêts à avaler les kilomètres. Le cœur vaillant et le sourire aux lèvres, nous allons d’un pas sûr et rapide, heureux de se déconnecter du monde et de se reconnecter tous les deux.

Km 1,5. Je me rends compte que j’ai oublié mes bâtons dans la voiture. Un aller-retour au pas de course plus tard, nous pouvons enfin prendre notre vrai départ. Si je me suis maudite tout le temps qu’il m’aura fallu pour retourner à la voiture, ce sont 20 minutes « perdues » qui m’auront été salutaires par la suite.

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Sur la piste du Petit-Témis

La première partie du sentier suit le parc interprovincial du Petit-Témis, une longue piste cyclable de 130 kilomètres de long entre Edmundston et Rivière-du-Loup au Québec. Au début boisé le long de la Madawaska, le chemin se fait peu à peu moins bucolique à mesure qu’il traverse des quartiers résidentiels et se rapproche de l’autoroute.

Km 3. Nous croisons beaucoup de cyclistes, quelques coureurs et aussi Michelle, une marcheuse qui vient bavarder quelques minutes. C’est suffisant pour que l’information qui nous manquait – où allions-nous dormir ce soir – nous tombe du ciel : Michelle nous indique qu’on trouve un bivouac au niveau du rang 2. Hop, c’est décidé : ce soir, on dort au niveau du rang 2 !

Le fait de ne pas commencer le sentier en pleine nature a ses avantages : plusieurs restaurants ponctuent le sentier, comme Le Patrimoine ou Chez Mel à Saint-Jacques. Pour tout dire, on n’a tout simplement pas prévu de pique-nique pour le midi. C’est toujours ça de moins à porter ! Notre objectif : le jardin botanique du Nouveau-Brunswick, situé environ au kilomètre 12. Nous arrivons à 12 h 02 au Café Flora, laissons nos noms à la serveuse, allons nous installer dehors et profitons d’un peu de repos à l’ombre en attendant l’heure de passer à table. Pourquoi se presser ? Je ne suis pas certaine que les repas du café Flora répondent exactement aux besoins nutritionnels d’une randonneuse affamée. En revanche, une chose est sûre : ils répondent parfaitement à ses besoins gustatifs ! Tout est délicieux.

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L’arrivée au Tunnel

Les quatre kilomètres après le jardin sont rudes : aucune ombre, le bruit des véhicules qui filent à toute allure à côté de nous sur l’autoroute, notre estomac plein qui proteste et aimerait faire la sieste. On comprend mieux pourquoi plusieurs personnes nous avaient conseillé de commencer le sentier au kilomètre 18. Obstinés que nous étions, on voulait à tout prix faire le sentier en entier. À refaire, on zappera sans doute la première partie pour se consacrer aux portions dans les bois.

Il arrive, ce fameux kilomètre 18. Le lieu-dit du « tunnel » : une trémie sous l’autoroute et quelques centaines de mètres plus loin, un panneau « Bienvenue » dont la bonhommie n’enlève rien au fait que les choses sérieuses commencent maintenant. Le temps de s’asperger d’antimoustique, d’inscrire notre nom dans le registre, et c’est parti.

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C’est à ce stade, littéralement 500 mètres après le début du « vrai » sentier, que nous croisons les seuls et uniques autres promeneurs, visiblement ici pour promener leurs chiens. Pour le restant de la randonnée, nous serons seuls.

Cette première montée est adoucie par les petits mots laissés à la craie par des inconnus sur des roches : des citations sur la nature ou des conseils bienvenus comme « Respirez« . Notre sac n’est pas si lourd que ça, il fait relativement frais, mais la première montée est toujours un baptême du feu, surtout avec déjà 18 kilomètres dans les jambes. Malgré la faible altitude de cette partie des Appalaches, le sentier Meruimticook n’en garde pas moins une bonne succession de montées et descentes, et il va falloir faire avec.

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Bivouac sur le rang 2

Arrivés au rang 2, nous tombons sur un espace plat avec un foyer, mais en gravier. Perplexité. Serait-ce là, le fameux bivouac dont on nous avait parlé ? Cela nous semble tout sauf confortable et nous décidons de poursuivre. Il est environ 17 h, nos jambes crient qu’il est temps de s’arrêter.

Km 23 environ. Le rang 2 est un chemin de terre entre des murailles de forêt ; pas d’ouverture possible depuis un ou deux kilomètres, aucun espace où glisser notre tente. Heureusement, une grande clairière nous offre le bivouac de nos rêves : une prairie quasi plate, assez grande pour nous installer un peu en retrait de la route, des fleurs, un ciel grand comme notre soulagement de nous arrêter pour la nuit. Le moelleux de la prairie détend un peu nos jambes fatiguées. Nous avons toute la soirée devant nous en ce 24 juin, et nous savourons le soleil couchant avec la même ferveur qu’un jour de solstice.

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C’est là qu’entrent en scène nos némésis. Les mouches noires. Vous ne les connaissez pas ? Comme je vous envie ! Ces minuscules insectes de quelques millimètres de long sont les pires ennemis du randonneur. Les moustiques, c’est pénible, mais une couche d’antimoustiques et vade retro satanas. Les mouches noires, elles, cherchent le moindre centimètre carré de peau sans antimoustique et elles le trouveront, c’est inéluctable. Tant qu’on est en mouvement, on peut se concentrer sur notre effort et les oublier un peu, mais une fois au repos ? Et bien c’est une nuée de moucherons qui s’agrippe à nous et tente de nous rendre fous. J’alterne entre petites séances dehors pour profiter du soleil, que ce soit pour prendre des photos ou accrocher mon sac à provisions à un arbre pour la nuit, et répit dans la tente. Nous éteignons les lampes à 21 h, alors que le soleil n’est pas encore couché.

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Deuxième jour, du rang 2 au lac Baker

Réveil à 6 h. La nuit a été mouvementée, entre la symphonie des oiseaux au crépuscule comme à l’aube, le chant des chauve-souris volant au-dessus de la tente et un bruit… Vous savez. LE bruit. Le bruit indéfinissable qui pourrait aussi bien être le souffle d’un ours, la course d’un orignal, le pas d’un sasquatch. Le bruit qui fout la trouille aux randonneuses inexpérimentées comme moi.

Au réveil, c’est un spectacle de givre qui nous attend. C’est froid et beau. Le soleil fait fondre progressivement ces petites sculptures délicates en se levant. Je constate que mon sac à ours est toujours bien pendu et mieux encore, que les écureuils ne l’ont pas pris pour buffet. Il est 7 h, la forêt est éveillée, nous commençons à marcher au son d’une tronçonneuse quelque part dans le bois.

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Ce matin, les montées se suivent et se ressemblent. À chaque col, nous voyons la prochaine vague verte à franchir, inéluctable. Je perds le compte mais entre notre bivouac et le camp Sisson, il y a au moins quatre côtes. Il nous faut près de trois heures pour franchir 10 km. Malgré cette allure de tortue, à chaque montée, je suis ébahie de voir à quel point les bâtons m’aident. Je les prête à Etienne le temps d’une montée et la différence est flagrante pour tous les deux. Nous finissons par en prendre un chacun.

Je n’ai pas l’habitude d’utiliser des bâtons pour randonner car mon sac est le plus souvent léger, mais j’ai bien vu en m’entraînant avec un sac plus lourd que mes genoux et mes chevilles avaient tendance à souffrir en fin de journée. Pour éviter de trop mettre mon corps à l’épreuve, j’ai investi dans deux bâtons tout simples. C’est tout simplement une des meilleures décisions que j’ai pu prendre, que vous pouvez prendre, pour vous faciliter la vie dans une randonnée longue et/ou intense. Les montées sont mille fois plus douces, les descentes dans les racines mille fois plus faciles. Au moins.

Petit moment de grâce quand une trouée apparaît dans les arbres et que la vue se dégage. D’en haut, la forêt semble dense, impénétrable, entière. C’est une illusion : d’en bas, elle s’avère quadrillée de chemins forestiers. De chemins plus ou moins dégagés, plus ou moins récemment, qui semblent aller partout et nulle part. Des chemins d’où s’envolent des nuées de papillons à chaque pas, comme un conte de fées.

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Sieste au camp Sisson

Km 33. Au bout d’une longue descente, c’est le camp Sisson. Une cabane toute simple, trois couchages, sans électricité, mais quel plaisir de poser le sac. Gratitude éternelle aux bénévoles qui ont pensé à tout : un poêle et une bonne pile de bois, un banc, et même une chaise berçante ! Un peu plus loin, trois plateformes pour installer sa tente sur un terrain plat ou assez de pelouse pour en planter d’autres. Je me dis que les fins de semaine doivent être animées.

Nous installons un matelas sur une banquette. Vous savez, « juste pour voir ». Nous fermons les yeux, vraiment « juste pour voir ». Nous les ouvrons une heure plus tard, un peu reposés. Il est 11 heures. Dilemme : s’accaparer les couchettes pour s’octroyer une journée de détente et une soirée loin des mouches noires, ou reprendre la route et monter le camp plus tard, plus loin ?

« Mais si on s’arrête maintenant, on aura droit à une journée infernale de 20 km demain », dit Etienne.

Notez bien cette observation pour la suite.

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C’est vrai que sur le moment, ça semblait bête de s’arrêter là, d’autant plus qu’on n’avait pas grand-chose pour occuper la journée, à peine un magazine. Remettre notre sac nous arrache toujours quelques grognements mais nous repartons.

Aucun grognement n’est plus fort que ceux qu’on pousse au pied de chaque nouvelle montée. Ce sentier est en montagnes russes, vous êtes prévenus ! Les côtes ne sont pas longues, mais c’est leur accumulation qui est le principal défi, à mon humble avis. Ça, et le fait que le sentier ne prend aucun détour et grimpe raide. Comme souvent, le truc pour arriver en haut d’une montée, c’est d’y aller pas à pas. Évident, non ? Un pas après l’autre après l’autre et tout devient possible !

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Sa Majesté des Mouches

Km 40. Sur le coup de 13 heures, nous nous mettons en chasse du lieu de pique-nique idéal, celui où reprendre des forces dans un joli cadre. Cela fait plusieurs kilomètres qu’on suit un chemin forestier, il n’y a pas beaucoup d’endroits propices. Soudain, un ruisseau, une petite crique, des arbres, on s’installe. Et les mouches noires arrivent. Et elles ne lâchent rien.

Km 40. C’est le moment où Etienne craque.

« Et si on finissait aujourd’hui ? »

On a déjà vingt kilomètres dans les pattes. Et il en reste encore dix. Je suis moyennement emballée. Je n’ai pas envie de rejouer le semi-échec du sentier Dobson, que nous avions interrompu lui aussi. J’ai envie de passer deux nuits sur ce sentier. Mais si Etienne le sportif, le compétitif, celui qui ne renonce jamais, dit qu’il en a assez, c’est qu’il y a un problème.

Le problème, ce sont les mouches. Les mouches qui nous harcèlent. Il faut le reconnaître : nous n’étions pas bien préparés psychologiquement aux mouches. Sur nos sentiers du sud-est du Nouveau-Brunswick, la plaie, ce sont les moustiques ; les mouches noires y sont anecdotiques. Depuis hier, notre antimoustique nous évite des piqûres mais rien ne nous avait préparés au ballet constant de ces moucherons infernaux.

On pèse le pour et le contre le temps d’un pique-nique sommaire. J’accepte d’abréger la rando à la condition qu’on s’arrête immédiatement si l’un de nous fatigue trop. Pas question de se blesser. Étrangement, j’ai l’impression que celui de nous deux qui souffre le plus, ce n’est pas moi.

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Du chemin de la Petite Rivière au lac Baker

Le sentier descend à présent longuement via un chemin très agréable sous les arbres jusqu’à arriver au chemin de la Petite Rivière, qu’il longe ensuite dans un tapis d’herbes, de champignons et de fleurs qui ferait un bon bivouac. Un autre emplacement de camping se présente à nous : le bivouac Kiwonik (la loutre de rivière). Mais nous ne sommes qu’à 6 km du lac Baker, il est 15 h. On peut le faire. Je rêve de tremper mes pieds dans l’eau fraîche. Etienne fantasme sur une bière fraîche. On garde le moral, et on continue.

Au détour d’un sentier, une variante alléchante se présente : au lieu de suivre le chemin forestier, elle s’enfonce dans la forêt en longeant la rivière. C’est tentant mais à ce stade, sans savoir si nous partons pour un raccourci ou pour 15 kilomètres supplémentaires, c’est niet. Nous restons sur notre chemin forestier.

Km 44. Peu avant l’ultime côte, un envoyé providentiel : Guy sur son quatre-roues. On l’arrête pour lui demander si on est loin du camping. Il voit la fatigue dans les yeux d’Etienne et le prend en pitié : il le déposera quelques 3 km plus loin. Moi, je vais très bien. Je sais que je serai terrassée de fatigue ce soir, mais je peux encore gambader comme un cabri. Je les laisse partir à deux et je caracole à leur suite. Guy reviendra me chercher et malgré ma fierté qui me pousse à vouloir faire les 50 km à pied, uniquement à pied, je monte sur ce quad providentiel. « The trail provides », dit-on en anglais sur les longs sentiers. « Le sentier a la solution« , et ça y ressemblait bien, à ce moment. Ou plutôt, Guy avait la solution. Merci Guy !

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Km 47. La dernière montée. La plus dure ? Peut-être. Elle grimpe raide, c’est sûr. À ce stade, vous vous demandez sûrement quel plaisir nous retirons de la randonnée, si ce n’est un plaisir malsain ? J’essaie ni d’enjoliver les choses ni de tomber dans une autodérision qui ressemblerait à une critique. Mais oui, bien sûr qu’on en bave parfois, et que ce sont souvent précisément ces souvenirs-là qui restent avec nous, et nous donnent le plus de fierté. Km 48. Je me souviens de cette dernière montée interminable, où on donne tout physiquement et mentalement pour arriver au col et voir enfin le lac Baker. Km 49. Cette dernière descente, avec le lac qui se dévoile entre les arbres, où on se retient mentalement de courir pour rejoindre le camping plus tôt. Km 50. Le moment où on signe le registre de nos deux prénoms accompagnés d’un FINI ! aussi hargneux qu’heureux. Km 50,5. La dernière ligne droite avant le camping, les derniers mètres avant la terrasse, le moment où on pousse la porte, un peu gênés par notre apparence et notre odeur. Km 51. Le moment où on pose le sac pour s’asseoir en se mettant à glousser de manière incontrôlée.

Le moment où le thé glacé et la bière arrivent.

Le moment où on trinque, ivres de joie et de fatigue.

Le moment où la dame de la table d’à côté nous demande si on est des randonneurs.

Le moment où lui répond « Oui, on vient de faire le Meruimticook en entier. »

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Ce que j’ai aimé sur le sentier

  • C’est un excellent sentier pour débuter la randonnée sur plusieurs jours : comme il suit des routes forestières, il ne donne pas l’impression d’être isolé en pleine nature. C’est très rassurant.
  • Le Camp Sisson est très bien aménagé, avec des couchages au sec, un poêle, des bancs et des plateformes pour les tentes. Bravo les bénévoles ! Rien ne garantit une place à l’intérieur puisqu’il fonctionne au premier arrivé, premier servi, mais le site fait une belle étape.
  • Il est facile de faire l’essentiel du sentier en deux jours (du tunnel au camping), ce qui en fait une bonne option pour aller jouer dehors l’espace d’une fin de semaine.
  • Le balisage est excellent : le marquage blanc et rouge est très facile à suivre. Nous ne nous sommes pas perdus une seule fois. Pour l’anecdote, c’est le même marquage que celui des chemins de Compostelle ! J’ai apprécié les balises indiquant qu’on part dans une mauvaise direction : par deux fois, nous aurions pu nous engager sur une mauvaise voie si nous n’avions pas vu ces balises.

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Ce que j’ai moins aimé sur le sentier

  • J’ai regretté le manque de points de vue. Je marche dans l’optique d’être récompensée par des belvédères et malgré la présence de deux endroits avec une vue dégagée, je reste un peu sur ma faim. J’espère que la suite du sentier sera plus panoramique.
  • Les routes forestières peuvent être fatigantes en raison des grosses pierres. J’ai préféré les portions plus étroites sur une terre moelleuse !
  • Si vous tenez à votre sang, ne venez pas en juin. Les mouches noires sont impitoyables et ne feront qu’une bouchée de vous et de votre motivation. Mettez-vous en forme ailleurs et faites le sentier plus tard dans l’été !

Et si c’était à refaire ?

  • On partirait du tunnel, qui permet de viser raisonnablement le camp Sisson pour y passer la nuit.
  • On porterait moins d’eau… La situation est peut-être différente à la fin de l’été, mais en juin, il y a de l’eau en abondance à intervalles réguliers.
  • On resterait absolument souper et dormir au camping Rest-o-Lac à la fin !

Où dormir avant ou après le sentier Meruimticook ?

Avant de partir, le Four Points Sheraton, 100 rue Rice, Edmundston, en plein centre-ville, peut faire une bonne base avec ses lits confortables. Autre option : Morel Executive Suites, 51 rue Emmerson, Edmundston, propose des appartements tout équipé à deux pas des Brasseurs du Petit Sault.

Au retour, il y a quelque chose de magique à séjourner au camping Rest-o-Lac, avec sa terrasse qui donne sur le lac et ses merveilleux couchers de soleil. Vous pouvez y dormir en tente ou dans un petit chalet tout équipé dont vous apprécierez le lit moelleux ! Autre option totalement valable : le Quality Hotel & Conference Center, 110 boulevard Chief Joanna, Edmundston, le seul en ville à proposer un spa (jacuzzi). Et laissez-moi vous dire qu’un long passage au spa après une randonnée éprouvante, ça fait un bien fou !

Enfin, parce que vous le méritez amplement après avoir fait un tel périple, les dômes Ekö Nature Glamping sont la récompense ultime avec leur grand lit avec vue sur le lac Baker, leur barbecue et leur jacuzzi privatif. Cerise sur le gâteau : une partie du sentier mène directement aux dômes !

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Idées d’étapes sur le sentier Meruimticook

Voici quelques idées d’étapes à moduler selon votre énergie et le temps dont vous disposez. Les distances indiquées sont globalement à la louche, à 1 ou 2 km près.

Le sentier en accéléré :

  • Jour 1 : tunnel – camp Sisson (15 km)
  • Jour 2 : camp Sisson – Lac Baker (20 km)

Le sentier classique :

  • Jour 1 : office du tourisme – parc provincial de la République (11 km)
  • Jour 2 : parc provincial de la République – camp Sisson (19 km)
  • Jour 3 : camp Sisson – lac Baker (20 km)

Le sentier en prenant son temps :

  • Jour 1 : office du tourisme – parc provincial de la République (11 km)
  • Jour 2 : parc provincial de la République – camp Sisson (19 km)
  • Jour 3 : camp Sisson – bivouac Kiwonik (15 km environ)
  • Jour 4 : bivouac Kiwonik – lac Baker (6 km environ)

Inscrivez-vous sur AllTrails pour plus d’infos sur ce sentier

Ressources

  • Le meilleur magasin de rando au Nouveau-Brunswick à ma connaissance : The Radical Edge, 386 rue Queen à Fredericton.
  • Gens de Moncton, le magasin de sports à Alma est une bonne ressource pour les repas lyophilisés de la marque Happy Yak
  • Une bonne partie de notre équipement provient de Décathlon Canada, imbattable en termes de prix
  • L’application Ondago, réellement utile pour se situer sur le sentier.
  • La fiche Rando NB (traduite par mes soins) est encore sommaire mais donne le fichier GPS : voir ici.

Et vous, connaissez-vous le sentier Meruimticook ? Vous ai-je donné envie de le faire à votre tour ? Avez-vous déjà fait une randonnée sur plusieurs jours ? Je vous attends dans les commentaires ! Oyez, oyez. Ce billet contient des liens affiliés. Le prix d’achat ne change pas pour vous, mais vous me donnez un petit coup de pouce financier au passage. Pour cette randonnée, j’ai été rémunérée par l’office Tourisme Edmundston et région, que je remercie chaleureusement ! Randonnée réalisée en juin 2021.

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9 thoughts on “NOUVEAU-BRUNSWICK // Le sentier Meruimticook”

  1. Charles Collin

    Merci pour ce beau blog sur le Sentier Méruimticook.
    Charles

    1. Audrey

      Merci à vous Charles pour ce beau sentier! Je rêve de revenir le faire au complet une fois qu’il sera achevé 🙂 (mais pas en juin!)

  2. Superbe ce sentier, bien qu’il manque de panorama ! Les mouches noires, je ne connais pas, les moustiques, ça me suffit déjà ! :p

    1. Audrey

      Je pensais que les moustiques étaient les pires créatures au monde mais j’ai trouvé mieux (pire ?) ! Je suis heureuse d’avoir pu faire ce sentier de bout en bout !

  3. Bravo pour la randonnée, l’enfer des maringouins et des mouches, trop de bons moments gâchés par ces petites bibittes.

  4. Bravo à vous pour ce périple, qui avait l’air à la fois génial et éprouvant ! Ça fait toujours des bons souvenirs !!

  5. Mike

    Salut! C’est un merveilleux blog. Avez-vous été ramené au point de départ ou aviez-vous deux véhicules ?

    1. Audrey

      Merci Mike! Nous avons été ramenés au point de départ.

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