Ce n’est plus vraiment un secret : le nord de la France n’a plus l’image du territoire austère et rebutant qu’il a traînée malgré lui tout au long du XXe siècle. Depuis quelques années (grâce à un certain film, sans doute…), le pays des Ch’tis a la cote et il faut dire qu’entre un accueil en or, une gastronomie savoureuse et des villes superbes, les Hauts-de-France ont de beaux arguments pour séduire les voyageurs. Si vous connaissez déjà Lille, je vous propose aujourd’hui de vous éloigner légèrement de cette belle métropole pour chevaucher les frontières du Nord de la France, le temps d’une excursion qui flirte avec la Belgique et les liens entre ces deux pays, organisé lors de ma participation au salon des blogueurs de voyage mouture 2019. Beffrois de contes de fées et sport traditionnel, église Art déco et sentier des contrebandiers, la journée s’annonce chargée. Pas la peine de prendre des victuailles, il y aura toujours des gaufres sur la route. En route pour une excursion autour de Lille !
Musée des arts et traditions populaires de Wattrelos
Pour commencer la journée, direction une « cense », alias une ferme traditionnelle picarde. Nous n’allons pas voir les vaches, mais visiter le Musée des arts et traditions populaires de Wattrelos. Ce musée regroupe une collection d’objets du passé, organisés en saynètes pour mieux comprendre comment on vivait dans le Nord et la Belgique, autrefois. L’atelier du tisserand, l’estaminet, la salle de classe ou encore l’imprimerie… nous découvrons des métiers oubliés, des noms insolites et des objets délicieusement rétros.
Cerisiers en fleurs et beau temps à la mi-avril !
Le beau corps de ferme du Musée des arts et traditions populaires de Wattrelos
Dans les musées ou sur les brocantes, j’adore découvrir des objets du quotidiens qui sont désormais totalement désuets, il s’en dégage toujours un charme empreint de nostalgie. Ici, je suis comblée avec des expositions qui font la part belle à la vie d’antan et à tout ce qui était autrefois indispensable : encriers d’écoliers, minis-globe terrestres portables, objets pour se livrer à la contrebande comme des colliers de chiens avec compartiments secrets (si, si !)… En repartant, je n’arrive pas à savoir si la vie d’alors était bien plus simple ou bien plus compliquée que maintenant.
Chez le tisserand…
La salle de classe d’antan : je suis fascinée par les encriers et les plumes
Infos pratiques
- 96 rue François Mériaux, Wattrelos
- Ouvert du mardi au samedi, 9-12 h et 14-18 h, le dimanche de 15 à 18 h
- Entrée libre pour tous !
Une partie de jeu de bourle
Connaissez-vous la bourle ? Ce jeu populaire dans le Nord de la France et en Belgique se joue en équipe, comme une pétanque du nord, à cela près que les « bourles » (pas de faute d’orthographe ici) sont de grosses meules qui peuvent dépasser allègrement les 8 kg.
Aux Amis de la Bourle, nous sommes reçus par Christian Ladoe, un passionné qui nous en dit plus sur l’histoire de ce sport traditionnel. Très populaire autour de Lille au début du XXe siècle, il est un peu tombé en désuétude, avec seulement une trentaine de bourloires restants dans le département du Nord. La fédération des sociétés de bourle de Wattrelos peine à trouver de nouvelles recrues, malgré une inscription de ce jeu au patrimoine culturel immatériel français en 2012. J’ai le cœur serré à écouter Christian parler du déclin de ce sport qu’il semble aimer de toute son âme. Sachez que vous pouvez essayer ce sport gratuitement, et si vous vivez dans la région, pourquoi ne pas y inscrire vos enfants ? L’ambiance est conviviale et on apprend de belles compétences de jeu en équipe, d’adresse et de dextérité.
Observez la courbe du bourloire
Évidemment, nous avons essayé ! Règles du jeu : la bourle se joue à deux équipes dans un bourloire, pourvu de longues pistes incurvées. On joue une équipe après l’autre : la première tente de placer ses six bourles de la façon la plus gênante possible. Pas besoin d’adresse ici : un méchant petit lancer peut transformer votre bourle en obstacle redoutable. Puis, c’est au tour de la deuxième équipe, qui tente de contourner ces obstacles pour atteindre l’étaque (le cochonnet, en somme). Entre la courbe de la piste et celle de la bourle, le jeu prend des allures de bateau ivre, et c’est justement ce qui est amusant. L’histoire ne dit pas si mon équipe s’est pris une saucée ou non (bon, bref, passons…).
Concentration avant le lancer…
On ne dirait pas de belles meules de fromages ?!
Infos pratiques
- Amis de la Bourle, rue du Breuil, Wattrelos
L’église Saint-Chrysole et le beffroi de Comines
Quelle église surprenante que l’église Saint-Chrysole. D’habitude, les églises en France, c’est un peu la routine : romanes ou gothiques ? Contemporaines à la rigueur ? Mais une église néo-byzantine, ça ne court pas les rues ! Détruite pendant la première guerre mondiale, l’église de Comines est reconstruite entre 1922 et 1938. Son architecte, Maurice Storez, imagine un style néo-byzantin sans contrefort ni arc-boutants, qui rappelle presque une mosquée vue de l’extérieur, avec son dôme, ses vitraux géométriques et son clocher séparé. Un superbe exemple de mariage des genres !
L’intérieur aussi est différent de tout ce qu’on connaît en matière d’église, que ce soit les couleurs choisies ou l’architecture très Art Déco. Je me régale de cette église insolite, colorée comme un bonbon. De l’intérieur, on se rend compte des caractéristiques de l’architecture néo-byzantine, riche en dômes et en voûtes en plein cintre.
Une curiosité qui m’a subjuguée en arrivant devant l’église : le beffroi de Comines, tout droit sorti d’une imagination fantasmagorique. Ce beffroi formidable, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, serait une copie à l’identique de celui de 1623. Le beffroi désigne tout le bâtiment, et pas seulement la tour comme je le pensais. À l’origine simple structure de bois sur des remparts, le beffroi est depuis longtemps le symbole d’une commune et de sa puissance, qu’elle exhibe à travers des constructions imposantes ou, comme ici, pourvus de détails d’une exquise délicatesse. J’aime à penser que les bâtisseurs de Comines étaient des artistes un peu rêveurs, pour avoir coiffé leur hôtel de ville de si jolis bulbes en ardoise, qui ne sont pas sans rappeler un univers enchanté.
Et les frontières, alors ? Et bien sachez que Comines est une commune à cheval sur France et Belgique, avec une Comines française, et une Comines belge. Situation bien connue des régions frontalières et qui me rappelle mon cher Léman franco-suisse avec ses villes à double nationalité.
Infos pratiques
- visiter l’église Saint-Chrysole : visite libre le lundi matin
- visiter le beffroi de Comines : il n’est malheureusement pas possible de le visiter, mais on l’admire très bien depuis la grand’place
Aux prés du Hem, sur les chemins des contrebandiers
Pour le déjeuner, direction les Prés du Hem, à Armentières. Nous savourons la cuisine du Nord chez Marguerite Barameuh, établissement simple qui sert une cuisine honnête et familiale. Le tout sur le thème des vaches ! J’y ai goûté une bonne tarte au maroilles, un régal !
En guise de promenade digestive, nous partons à la découverte des Prés du Hem, un parc de loisirs gigantesque au sein de la Métropole lilloise : pas moins de 120 hectares avec un lac, une plage, une réserve ornithologique, le tout à cheval sur France et Belgique (n’oubliez pas que le thème du jour est de jouer sur les frontières).
Un de mes meilleurs souvenirs de cette journée, c’est la découverte du sentier Vanupieds. Imaginez un peu : un kilomètre de long à parcourir pieds nus pour une expérience sensorielle inédite : découvrir – par la plante des pieds – des dizaines de textures et matières différentes, qui vont de la tourbe au sable en passant par des matières locales comme la pierre d’Armentières, les tuiles du Nord, les… les capsules de bouteilles de bières locales !! C’est improbable et c’est génial : les tronçons s’enchaînent et ne se ressemblent pas, on ressent des matières chaudes ou froides sous le soleil d’avril, gniii un petit massage plantaire par là, oh une matière désagréable vite filons, ouh là j’aime assez j’ai envie de faire les cent pas sur ce revêtement, bref c’est ludique et agréable : une bonne idée !
Florilège de textures : les reconnaissez-vous ?
Place au Marais des contrebandiers. Ce sentier ludo-éducatif s’adresse en priorité aux enfants, mais j’ai appris des anecdotes sur la contrebande entre France et Belgique. Encore une fois, le parallèle avec ma Haute-Savoie natale est flagrant, et j’ai encore à l’esprit nos virées en Suisse, quand j’étais enfant, pour ramener du chocolat de contrebande. Pas que ramener du chocolat était illégal, mais c’était assez drôle de l’imaginer. Un petit pavillon offre des informations et des photos historiques pour mieux appréhender la réalité de la contrebande entre France et Belgique. Plusieurs produits étaient prisés des contrebandiers, comme les cigarettes ou les bas nylon. Le marais propose de choisir son camp : êtes-vous plutôt douanier ou contrebandier ?
Infos pratiques
- Marguerite Barameuh et Prés du Hem : 7 avenue Marc Sangnier, 59280 Armentières
- Entrée aux Prés du Hem : 8€/adulte, 5€/enfant, avec accès à toutes les activités. Attention, les chiens ne sont malheureusement pas admis.
Le beffroi d’Armentières
Le clou de la journée : une visite du beffroi d’Armentières et surtout, l’ascension de sa tour. Ce beffroi aussi est classé à l’Unesco, comme celui de Comines (et une cinquantaine d’autres beffrois de France et de Belgique). Comme à Comines, ce beau beffroi était signe de puissance, son but était d’en imposer. Armentières a en effet été une cité prospère au XIXe siècle, portée par la Révolution textile. On la surnommait alors la Cité de la bière et de la toile. Ravagée pendant les deux guerres mondiales, elle est alors reconstruite à 90 % et change sa devise pour « Armentières, l’alliance de caractères« . Un clin d’œil à ses secteurs d’activités, toujours multiples, ou à son héritage entre France et Belgique ?
Nous avons la chance de suivre une visite guidée de la tour du beffroi. Pas moins de 200 marches, ça grimpe ! Nous faisons des arrêts pour en apprendre plus sur l’histoire de la structure ou tout simplement, pour admirer ce qui nous entoure. C’est qu’à force de grimper, nous sommes passés derrière les faces de l’horloge – instant d’émerveillement garanti. Puis, après un dernier escalier périlleux, c’est la magie d’un belvédère intime et grandiose à la fois.
Du haut de la tour, le regard s’étend jusqu’à la Belgique. La région ne démérite pas son surnom de « plat pays » mais c’est au profit du panorama, qui s’étire loin, très loin. Je suis surprise de voir une mer de toits ocre sous mes yeux, moi qui croyais que le Nord ne connaissait que les toits gris, qui m’ont toujours paru un peu triste. Rien de tel ici : c’est une ville chaleureuse qui s’étend à nos pieds dans la douceur du printemps.
Armentières, idéale pour une escapade insolite autour de Lille
La journée est terminée, il est temps de retourner à Lille. Si vous êtes de passage dans la région, n’hésitez pas à aller faire un tour au Petit musée de la Gaufre, malheureusement fermé lors de notre visite. Nous avons toutefois pu goûter certains de ses produits et je ne saurais que trop vous conseiller l’inimitable gaufre au parfum mojito ! Pour des parfums plus classiques, la fameuse gaufre à la vergeoise et celle au spéculoos sont aussi un pur délice.
Infos pratiques
- visiter le beffroi d’Armentières : 3,50 €/adulte et 2,50 €/enfant, visite guidée sur rendez-vous du mardi au samedi
Où dormir à Wattrelos
- pourquoi pas au Spa Factory, 11 rue de Beaurepaire à Wattrelos ? Une chambre d’hôtes avec spa, ça ne se refuse pas !
Où dormir à Armentières
- Hôtel Joly, 12 rue du Président Kennedy, Armentières. Un joli hôtel familial avec petit-déjeuner, parking sur place et baignoire spa dans les suites.
- Les chambres du fil rouge, 38 place Saint Vaast. Des chambres d’hôtes avec pour « fil rouge » le thème des tissus. Une déco sobre et élégante, et un restaurant sur place.
Où dormir à Lille
- au Novotel Centre Grand Place, 116 rue de l’hôpital militaire. À 5 minutes de la Grand’Place et de Notre-Dame de la Treille, j’ai beaucoup aimé son emplacement. C’est un hôtel d’affaires avec des chambres propres et fonctionnelles, un accueil excellent et un lit gigantesque ! À partir de 109 € la nuit et 16,50 le gros buffet du petit-déjeuner. J’ai été invitée dans cet hôtel dans le cadre du salon des blogueurs de voyage 2019.
- à l’auberge de jeunesse Gastama, 109 rue de Saint-André, Vieux-Lille. Déco sympa et tarif très abordable dans le Vieux Lille. À partir de 22 € le lit en dortoir.
- Ibis Centre Grand’Place, 21 rue Lepelletier : hôtel très central avec une belle vue sur les bâtiments de la Grand’Place.
Cette journée d’excursion autour de Lille en avril 2019 a été rendue possible par ma participation au #WAT19 et par les offices de tourisme de l’Armentiérois et de Wattrelos. J’ai aussi été invitée par l’hôtel Novotel Centre Grand Place pendant la durée du salon. Je salue mes sympathiques camarades de virée, dont je suis ravie d’avoir fait la connaissance : Mélissa de Mel Loves Travel, Sandrine de Dreams World, Aurélie et Franck de I Wheel Travel, Vincent d’Evasions bordelaises et Filip d’Avant de partir. Oyez, oyez. Ce billet contient des liens affiliés.
Les Hauts-de-France sont une région si attachante ! On l’a découverte à la faveur de nos périples de mémoire, mais franchement nos excursions nordistes ont toujours été l’occasion de belles surprises et de belles rencontres, à tel point qu’on en redemande ! J’aime tout particulièrement l’ambiance flamande, que l’on retrouve de part et d’autre de la frontière justement. Les briques, les beffrois, la bière… le bonheur !!
Je remplace la bière par les gaufres et je suis tout à fait d’accord avec toi ! Et puis le maroilles… c’est du bonheur. Je connais assez mal la région pour n’y être allée que deux fois lors de très courts séjours, mais c’était à chaque fois un plaisir. Vous devez vous régaler dans vos escapades de mémoire !
Merci pour ce chouette article! Habituée de la braderie de Lille, j’adore le Nord, il y a tant à voir! (et cet article me donne plein d’idées pour un futur périple!) 😀
J’aimerais tellement aller à la grande braderie ! Il paraît que c’est spectaculaire (et convivial) ! J’espère que tu auras bientôt l’occasion de découvrir Armentières et Wattrelos 🙂
Que de belles découvertes ! J’aime beaucoup le bourloire, je crois que j’en avais déjà entendu parler, il faut être costaud pour soulever la bourle ! Je trouve l’église Saint-Chrysole superbe, très atypique c’est clair ! Le beffroi de Comines est surprenant et Armentières à l’air très intéressante à visiter ! 🙂
Oui il faut avoir un peu de muscles pour lancer ces quelques kilos ! Sans parler de l’adresse pour les lancer où on le décide 😀 Je suis ravie d’avoir pu essayer, c’était vraiment amusant.
je ne connais que Lille, de quoi donner envie de découvrir les autres sites sans hésiter!
Super article ! J’habite Lille et je découvre certains lieux grâce à toi (notamment le musée des arts et traditions populaires).
Dès la fin du confinement, j’y file !
Merci 🙂