Le voyage c’est comme la vie, et des fois, ça part un peu de travers. Ou beaucoup de travers. Tant que personne n’est blessé, tout va bien, et on en rira le lendemain. Et c’est souvent ce qui fait les meilleurs souvenirs de voyage. Voici un florilège des expériences les plus improbabli-comiques de ma carrière de voyageuse, entre petites galères en voyage et moments improbables.
5 – Avoir un visa annulé sur son passeport
En 2008, Etienne et moi avons voulu aller en Chine continentale depuis Hong Kong en ayant l’outrecuidance de se passer de visa. Parce que YOLO, on le savait, qu’on aurait dû avoir ce fameux visa, mais on s’était dit que sur un malentendu, ça pouvait passer.
À la douane de Shenzhen, on sort de Hong Kong comme de dans du beurre ; après tout, personne ne te retient quand tu as envie de partir d’un pays, sauf à être maso. Malgré notre beau visa de sortie, pas moyen d’avoir un visa d’entrée en Chine. On a eu beau faire les yeux doux aux douaniers de Chine continentale, ils n’ont pas voulu céder à nos charmes, les bougres.
L’espace de trente minute, nous avons été « nulle part ». Ni à Hong Kong, ni en Chine. Dans les méandres de la douane. Dans l’arrière-boutique, avec les petits fonctionnaires qui tamponnent des documents à la chaîne comme dans Indiana Jones.
Jusqu’à ce qu’un gros CANCELLED vienne annuler notre visa de sortie de Hong Kong. Et c’était reparti pour un visa d’entrée. Ouf. On n’a jamais eu autant de tampons sur notre passeport en une demi-heure. Un peu plus et nous passions dans la quatrième dimension (on appelle ça la prison, je crois)…
4- Prendre un taxi en Chine sans langue commune
La Chine est probablement notre fournisseur officiel des moments tragicomiques en voyage. Pour notre « vrai » voyage en Chine deux ans plus tard (avec un visa officiel, cette fois – on n’a pas fait deux fois la même erreur !), nous nous sommes retrouvés à Datong. Nous voulions aller voir les grottes de Yungang, recommandées par le Routard, mais sans accès en transports en commun. Évidemment, ce serait dommage de faciliter l’accès à un des plus beaux sites de la région.
Qu’a cela ne tienne, prenons un taxi ! J’ai fait trois ans de chinois en option à la fac ! Je peux tout dire ! Ces trois ans de chinois ont été suffisants pour négocier le prix de la course sur une calculette, faire comprendre au chauffeur, par des sinogrammes, qu’on voulait qu’il nous attende pendant la visite et qu’il nous ramène. Alors ça, j’en étais fière, d’avoir fait honneur aux deniers publics par cette utilisation brillante du système éducatif français.
Évidemment… il ne nous a pas du tout attendus. Rendus à la fin de la visite, il nous fallait bien rentrer à notre hôtel. On a pris un taxi au hasard, en tentant de lui faire comprendre qu’on voulait retourner au centre-ville, Le nouveau chauffeur n’a pas pris le même chemin qu’à l’aller, on a cru qu’il voulait nous entuber, on l’a fait s’arrêter, on a crié en français, il a râlé en chinois, bref la débandade. Je ne sais comment nous sommes rentrés. À pied, probablement.
Mais l’espace d’une dizaine de minutes, nous avons été à la merci d’un tueur-psychopathe-chauffeur de taxi. Peut-être. Ou juste d’un chauffeur de taxi qui se demandait bien pourquoi on autorise encore les touristes à entrer sur le territoire du saint Empire du Milieu sans licence de chinois.
Cela dit, cela valait le détour !
3- Se retrouver à regarder des vidéos de danse indienne dans l’arrière-boutique d’une salle de jeu d’argent à Copenhague
Lors de mon tour d’Europe en 2014, j’ai choisi des options propices aux partitudes-en-sucette (du verbe « partir en sucette ») : covoiturage, couchsurfing, couchsurfing avec des gens qui ne parlaient pas forcément bien anglais… Étonnamment, je m’en suis sortie vivante, mais deux soirées resteront parmi mon Top 3 de l’improbable, et les relater est toujours un défi.
Dans le genre « Amusons-nous avec Couchsurfing », je vous présente Nazir, un Pakistanais installé à Copenhague. Hormis le fait qu’il est très, très bavard, il est aussi le roi des plans un peu foireux, à arriver toujours avec des heures de retard dans prévenir et à nous faire dormir à trois dans une micro-studette. Heureusement, il était aussi très sympathique et souriant.
Toujours est-il qu’il avait prévu un soir de retrouver un ami, que ledit ami travaillait de nuit à la surveillance d’une salle de jeux d’argent, que j’étais là, qu’il m’a embarquée, et ni une ni deux, nous voici à passer la soirée à regarder des vidéos indiennes sur YouTube. Dans la salle de contrôle d’une salle de jeux d’argent. Je ne connais pas ces types. Je ne comprends à ce qui se passe sur l’écran. Tout. Est. Normal.
La vidéo d’un danseur indien restera sûrement gravée dans ma mémoire toute ma vie. Dommage que dans le feu de l’instant, je n’aie pas pensé à noter son nom pour la partager avec vous.
Et puis Nyhavn, c’est un peu trop mainstream. Moi je voulais découvrir le Copenhague underground.
2- La folle épopée de l’opéra à Saint-Pétersbourg
À Saint-Pétersbourg, je devais loger chez Olga, gentille couchsurfeuse qui vivait à l’extérieur de la ville. À peine l’avais-je retrouvée en ville qu’elle me demande si j’aimerais aller à l’opéra, elle devait y aller avec des amis. Friande d’expérience, je réponds bien évidemment oui. Et aussi, j’avais un peu peur qu’elle me laisse en plan si je refusais, mais passons. Le truc, c’est qu’elle n’a qu’un billet : c’est désormais le mien. Je sens déjà un peu le pâté dans cette histoire… mais passons. Elle me confie donc aux mains de ses amis, un papa avec ses deux loupiots de 5 et 8 ans. Russophones, la petite smala. La gamine de 8 ans est, de très loin, celle qui parle le mieux anglais de la bande. Mais passons ?
Me voici donc embarquée, avec de parfaits inconnus censés me ramener ensuite chez Olga, que je n’ai vue qu’une heure, pour regarder le ballet Eugène Onéguine. En russe. Pendant trois heures. Pas de sous-titrage, ce serait trop facile.
Après la pièce, nous prenons le métro, puis traversons une zone en friche peu éclairée pour rejoindre une vieille Lada qui ne tenait que par la peinture, pour enchaîner sur une demi-heure de voiture. Dans le noir. Vers nulle part. Ce qui m’a fait tenir, c’est qu’il y avait des enfants. Je me disais qu’en présence d’enfants, il ne m’arriverait rien.
Et M. Inconnu et ses enfants m’ont bien déposée chez Olga en pleine nuit, en pleine campagne, dans sa maison centenaire chauffée au poêle à bois, saine et sauve et surtout très ébahie de la tournure de la soirée.
Ce qui se passe à Saint-Pétersbourg reste à Saint-Pétersbourg…
1 – Les lions du Jura
Le Jura, c’est une petite chaîne de montagne en France. Très pittoresque, avec ses vallons, ses jolis lacs où on peut échapper à la chaleur du mois d’août. C’est un haut lieu de randonnées et de balades tranquilles, un endroit parfait pour faire une escapade depuis Lyon.
Le truc, c’est qu’Etienne et moi, on aime bien le camping. On a acheté une tente Quechua pour notre premier voyage ensemble, et depuis, c’est un peu de la nostalgie qu’on ouvre en même temps que cette tente. Et du sable de l’an dernier. Je mets un point d’honneur à m’en servir au moins une fois par été.
Ce week-end-là, nous sommes bien dans notre camping du Jura. Il fait chaud, le ciel est dégagé. J’ai regardé les étoiles, longtemps, plongeant dans les abysses cosmiques depuis mon matelas un peu sorti de la tente. Je me suis endormie avec des étoiles dans les yeux, littéralement.
Et je me suis réveillée en sursaut au son des rugissements. Longs, profonds, un son primal, qui réveille des peurs enfouies dans nos gènes depuis la préhistoire. Où étais-je ? En plein safari, avais-je rêvé que j’étais dans le Jura ? Dans le Jura, rêvais-je que j’étais dans la brousse ? Le papillon est-il Lao-Tseu ?
Ce n’est que le lendemain que nous avons compris. Un cirque était installé en bordure du camping. Je n’oublierai jamais le son de ces pauvres félins en cage, qui ont fait trembler une petite vallée du Jura par un beau mois d’août, alors qu’eux rêvaient sûrement de savane.
Y a comme un petit air de savane, non ?
Il y a aussi eu la fois où Etienne et moi avons failli chavirer d’une pirogue sénégalaise en pleine tempête, la fois où un prêtre orthodoxe m’a bénie pour la Chandeleur russe, le coup du concombre dans un sauna coréen, la grande déroute de notre descente en canot, la randonnée de la peur en Nouvelle-Écosse, la randonnée au pifomètre au Japon, les dizaines de fois où on a commandé à manger en aveugle en Chine, en Égypte, au Liban…
Bref, ces perles restent avec moi. Sans forcément encourager les déboires, je les accueille comme des moments qu’on ne peut vivre qu’en voyage, exacerbés par le fait d’être dans un environnement étranger. C’est aussi pour ce genre de moment qu’on voyage, non ?
Et vous, vous en avez eu, des moments improbables en voyage ? Je vous en supplie, j’attends vos anecdotes dans les commentaires, je me régale toujours de lire les tribulations et galères en voyage des autres ! On ne peut pas être les seuls à avoir des galères rigolotes, non ?
Ahaha mais que j’ai ri ! Oui il y a eu pas mal de moments WTF en voyage pour moi aussi, là comme ça je me rappelle du mec en Chine qui faisait caca sur le trottoir (oui oui) sans que ça choque personne sauf moi. Voilà voilà. La Chine de toute façon, je n’y retournerai pas de sitôt :-p (et pas seulement à cause de ça !)
Contente si la chronique t’a fait rire ! En Chine il y avait aussi des gens qui crachaient entre leurs pieds dans les cars longue distance… Je AIS que c’est culturel, mais… vraiment… pas possible 😉
Ce sont toutes ces petites anecdotes qui font la saveur du voyage. Même si pour certaines on ne rigole pas toujours sur le moment, peu de temps ou longtemps après ça fait de jolis souvenirs.
On en a même fait une série intitulé voyageur loser sur notre blog. Un peu d’autodérision ça ne fait jamais de mal. Merci pour cet article très sympa.
Merci Laura, je vais aller lire tout ça de ce pas !